Les recherches présentées dans cette thèse se situent dans le domaine de la sémantique computationnelle, domaine qui met à contribution les techniques de l'intelligence artificielle, les outils formels de la logique et les données et méthodes de la linguistique. Elles ont été menées sous la direction de Mario Borillo, animateur de l'équipe « Langue, Raisonnement, Calcul ». Cette équipe, à vocation pluri-disciplinaire, comprend des informaticiens de l'Institut de Recherche en Informatique de Toulouse (URA CNRS, Université Paul Sabatier, INP) et des linguistes de l'Équipe de Recherche en Syntaxe et Sémantique (URA CNRS, Université Toulouse-Le Mirail).

On s'intéresse dans ce travail aux phénomènes logico-sémantiques induits par l'emploi conjoint dans le langage naturel des concepts de temps et de négation. À cet effet, l'auteur mène une étude linguistique fine du terme présuppositionnel ne... plus, dans le but d'en dégager les propriétés sémantiques pertinentes. Cette étude permet de mettre au jour la contribution aspectuelle, temporelle, modale et pragmatique de ne... plus. Sur le plan aspectuo-temporel, d'une part, on observe une sensibilité du sémantisme de cette locution à divers facteurs comme la classe aspectuelle du prédicat en jeu, les temps verbaux, ou les adverbes temporels. On relève aussi, de façon moins prévisible, certains emplois à valeur modale, pragmatique. Sur un plan différent, le terme ne... plus s'avère constituer un point d'entrée fructueux pour l'étude du phénomène de la présupposition, et en particulier de son articulation avec la négation.

Sur la base de cette étude, qui constitue la première partie de la thèse, l'auteur propose une représentation de ne... plus dans le cadre formel de la Théorie des Représentations Discursives (DRT) développé par Hans Kamp (1981 : A Theory of Truth and Semantics Representation, Amsterdam ; Kamp & Reyle 1993 : From discourse to logic, Kluwer). Cette démarche, qui permet de contribuer à l'évolution de cette théorie en la confrontant à des données linguistiques et représentationnelles nouvelles, fait l'objet de la deuxième partie de la thèse. Elle conduit l'auteur, après avoir présenté la DRT dans son état actuel, à envisager son extension pour rendre compte des différentes propriétés de ne... plus, en particulier par le biais de la proposition de Rob van der Sandt (1992 : Presupposition Projection as Anaphora Resolution, Journal of Semantics, 9(4)) qui consiste à traiter les présuppositions comme des anaphores, dans le cadre de la DRT.

L'auteur présente enfin, en troisième partie, une formalisation complète du processus de traitement sémantique de cette locution : prenant en entrée une représentation syntaxique des énoncés à traiter, ce processus mène à une représentation sémantique de ces énoncés, dans laquelle se trouvent donc prises en compte leurs caractéristiques aspectuelles et présuppositionnelles, ce qui permet de calculer de façon complète l'information temporelle décrite par ces énoncés. Ce processus est formalisé au moyen d'un lambda-calcul inspiré de celui proposé par Nicholas Asher (1993 : Reference to Abstract Objects in Discourse, Kluwer) et intègre une formulation corrigée de l'algorithme de traitement dit « anaphorique » des présuppositions proposé par van der Sandt.